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« La vente de crédits carbone accompagne ma conversion en bio »

Le soja bio, valorisé en alimentation humaine entre 750€ et 800€/t, représente la meilleure marge de l'exploitation.

La valorisation des crédits carbone permet à Théophile Letierce, chef de culture dans l’Essonne, d’aller plus loin et plus vite dans ses changements de pratique.

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En 2020 et 2021, sept fermes du plateau de Saclay ont été accompagnées par AgroParisTech dans l’évaluation de leurs émissions de gaz à effet de serre et dans l’identification de pistes de progrès (lire l'encadré). « Ce projet, porté par l’association Terre & Cité et dont les conclusions s’appliquaient aussi pour mon exploitation, m’a sensibilisé au bilan carbone et m’a donné l’envie d’aller plus loin », raconte Théophile Letierce, chef de culture à la ferme d’Orsigny, à Saclay, en Essonne depuis septembre 2020.

La conversion bio des 210 ha de l’exploitation est lancée au printemps 2021. « Deux agriculteurs voisins, déjà en bio, m’ont aidé dans les changements que cette démarche allait impliquer, se souvient-il, reconnaissant. Nous partageons du matériel, comme le semoir et la bineuse à guidage optique. »

Projet sur cinq ans

En parallèle, après avoir pris contact avec plusieurs sociétés qui accompagnent les agriculteurs dans la vente de crédits carbone certifiés par le label bas-carbone, Théophile Letierce arrête son choix sur ReSoil. « Cette société ne surévalue pas les crédits carbone stockés et semble rester proche de la réalité, précise-t-il. C’est important en fin de projet pour ne pas avoir de mauvaise surprise lorsque l’auditeur certifie la conformité du projet bas-carbone et le nombre de tonnes-équivalent CO₂ réellement économisées. »

Le projet « Label bas carbone » à la ferme d'Orsigny.

En mai 2023, l’exploitation est certifiée en bio et en septembre de la même année, le projet bas-carbone est labellisé pour cinq ans. « En m’engageant sur les deux plans en même temps, l’objectif était que la valorisation des crédits carbone me permette d’aller plus loin et plus vite dans mes changements de pratique, en installant des couverts intermédiaires sur plus de surfaces et en investissant davantage dans des engrais organiques notamment. Cela m’a aussi permis d’assurer ma transition plus sereinement alors que le marché bio est difficile. »

1 725 t de CO₂ économisées

Concrètement, la rotation blé-maïs-colza-betterave de la conduite conventionnelle a été modifiée et allongée en bio. Les betteraves, maïs et colzas ont laissé la place au triticale, à la féverole, à la luzerne, au soja, au sarrasin et au lin fibre. Le soja et le blé sont valorisés en alimentation humaine. Les légumineuses ont été intégrées pour capter l’azote de l’air. Pour compléter la fertilisation, les couverts intermédiaires sont installés sur un tiers des surfaces (avant les cultures de printemps), et le chef de culture achète des fientes de poules, des écumes de betteraves et du compost d’effluents d’élevage.

Selon le projet « label bas carbone », ces changements de pratiques (le recours à de l’engrais organique et non plus minéral, le développement des couverts végétaux et l’introduction de légumineuses) devraient permettre d’améliorer le bilan carbone de la ferme de 35 %, soit une réduction d’émissions de 345 tonnes d’équivalent CO₂ (t CO₂ eq) par an. Sur cinq ans, l’économie a donc été évaluée à 1 725 t CO₂ eq.

La luzerne permet d'apporter de l’azote et de réduire la pression des adventices, tels que les chardons, qui a augmenté en bio. (© Hélène Parisot / GFA)

Ces tonnes de carbone sont achetées à 52 €/t par un financeur, Digital Realty. Cette entreprise, basée localement et spécialisée dans la gestion des centres de données, contribue ainsi à la neutralité carbone. « 75 % du montant total revient à l’agriculteur et 25 % à Resoil pour financer notre fonctionnement et l’audit, explique Grégoire Alston, cofondateur de Resoil. Sur ces 75 %, l’agriculteur perçoit 40 % la première année pour accompagner le changement des pratiques, autant la deuxième et 20 % après l’audit. »

Selon le résultat de l’audit concernant le tonnage d’équivalent CO₂ réellement évité par rapport au prévisionnel du projet label bas carbone, une régulation est effectuée. Ainsi, la première année, Théophile Letierce touche près de 27 000 €, autant en 2025, et environ 13 000 €, à affiner selon le résultat de l’audit en 2028 (soit environ 67 000 € sur cinq ans).

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